Cette anecdote a lieu les années où j'habitais Montluçon.
Je passais beaucoup de mon temps libre à la pêche. En même temps, avec le Handball, je n'avais pas grand chose d'autre à faire.
Ma mère préférait me savoir au bord de l'eau avec mes amis, même si elle n'était pas tout à fait rassurée, qu'à trainer les bars ou faire le con dans les rues comme certains jeunes de mon âge.
Je partais la plupart du temps avec mon ami Alexandre, avec qui nous partagions nos deux passions de l'époque: la pêche et le handball.
On a vécu ensemble un paquet d'anecdotes, dont je vous raconterais quelques unes dans cette rubrique.
Ce jour là, nous avions décidé d'aller pêcher la rivière Cher, qui coule à Montluçon, comme tout le monde sait, au mort manié, à la recherche des carnassiers.
On s'était levé tôt ce matin, et je n'avais pas pris le temps de faire l'inventaire de mon matériel afin de m'assurer que rien ne manquait.
J'enfourchais ma mobylette et je partais prendre Alexandre qui me suivit avec la sienne jusqu'à l'endroit du Cher où nous avions décidé de pêcher.
Je me rappelle très bien ce matin d'automne. Il faisait assez doux, et une légère brume léchait la surface de l'eau.
Arrivés au bord de l'eau, nous commencâmes à préparer notre matériel.
Et pan, ce qui devrait arriver arriva:
"putain, elles sont où mes montures?" lancais je dans un cri caractéristique du mec bien énervé
Bien évidemment, mes montures mort-manié Drachkovitch étaient restées dans ma boîte de pêche à la maison...
Je savais qu'Alexandre fabriquait ses propres montures lui même. C'était un rebelle, il ne se voyait pas acheter plein tarif une monture qu'il pouvait élaborer lui même avec le matos acheté à l'unité.
"Pas de problème, je t'en file une", me répondit il.
Je me revois encore prendre sa monture, faire le noeud l'attachant à mon bas de ligne, et installer le petit gardon dessus.
Là aussi, je n'avais pas été courageux. J'étais allé acheter ces vifs chez le marchand de pêche. J'avais eu la flemme d'aller les pêcher alors que le Cher regorge de ces petits poissonnets bien utiles dans la recherche de pépère brochet...
Alexandre n'avait pas encore finit de préparer son montage.
Je m'approcha de l'eau, et je fis mon premier lancer derrière un énorme rocher que je distinguais, sous l'eau, au milieu de la rivière, dans un calme profond.
La touche ne se fit pas attendre, me surprenant littéralement!
"penduuuuuuuuuuuu, putain, c'est une poutreeeeeeeeeeeee"
Tu m'étonnes! La canne était pliée en deux, le poisson collé au fond, donnait de réguliers et puissants coups de tête! Je venais de ferrer sans doute le Brochet de ma vie, dépassant largement le mètre.
Mais au bout de 20s environ de combat qui me semblèrent une éternité, la bannière se détendit, et la monture, sans le vif, jaillit de l'eau.
Je restais là pendant quelques instants, dépité. Alexandra n'osa rien dire. Un silence hésitant entre le tragique et la comédie, avant la fusée d'insultes et de jurons divers et variés!
En ramenant la monture, je compris vite la cause de la bavure...
Alexandre avait mal fait son montage. La monture m'étais revenu sans les hameçons triples qu'il avait mal fixés sur le corps de celle ci...
Résultat, une poutre de plus du mètre, correctement ferrée, et qui ne demandait qu'à sortir, était partie avec les deux triples et le gardon au fond de la gueule, à cause de mon pote qui n'avait pas été foutu de monter correctement les hameçons.
Je me revois lui passant un savon comme rarement je lui en avais passé un, et lui, d'un air mi amusé quand même, de me répondre:
"bah en même temps, t'avais qu'à pas oublier tes montures Drachko, tu l'aurais pas loupé"
Il n'avait pas tort, et depuis ce jour, avant chaque partie de pêche, je vérifie mon équipement afin d'être sur de ne rien oublier..