Encore une histoire tirée de mes pérégrinations d'adolescence avec mon ami Alexandre.
Ce matin là, nous étions parti pêcher dans le Cher, sur sa partie coulant en première catégorie, à une trentaine de kilomètres de Montluçon où nous habitions alors.
La mobylette d'Alexandre étant en panne, j'avais du le prendre à califourchon sur la mienne! Je vous dis pas l'équipée: 60kms aller/retour avec le matos de pêche à deux sur un 103SP
Et pour courronner le tout, il a plu toute la journée sans arrêt! Nous étions trempés jusqu'aux os!
La journée de pêche ne fut pas une réussite! Au toc, le fil collant dans les anneaux, le vent glacial et la pluie combinés faisant, on a tous justes réussis à sauver le bredouille!
Et le retour fut un péplum, car le réservoir d'essence ne nous permit pas d'envisager rentrer chez nous à coup sur, si bien que dans les descentes, je coupais le moteur du 103 et avancait en roue libre pour économiser du carburant
Je vous laisse imaginé dans quel état nous arrivâmes chez moi, le soir! Crotteux et fourbus, mais aussi affamés comme des loups.
Ma mère n'était pas là, mais j'ai constaté en arrivant dans la cuisine qu'elle m'avait préparé une bonne soupe.
Il n'était pas prévu qu'Alexandre reste manger ce soir là, mais vu dans quel état il était, je lui ai proposé de partager cette soupe avec moi.
Après nous être séchés et avoir mis la table, je me suis mis à faire cuire la soupe, et nous la dégustâmes avec grande faim!
Alexandre faisait une tête bizarre, je n'ai pas compris tout de suite pourquoi.
Ma mère rentra quelques heures plus tard. Nous étions encore avachis tous les deux dans le salon, à regarder la télé!
"Ah, Alexandre est là" me dit elle
"oui, je l'ai invité à manger, on a pêché toute la journée, on était vannés"!
Et là, ma mère me lance la phrase fatidique qui résonne encore dans ma tête aujourd'hui:
"Tu as donné à manger au chien"?
"oui" lui répondis je.
" Tu lui as donné la soupe"?
"Quelle soupe?????"
(et là je revoie Alexandre devenir tout blanc...
)
"Ben la soupe qui était sur la gazinière dans la casserolle, j'y ai mis tous les restes de la semaine pour lui" lanca t'elle avant qu'Alexandre et moi soyons pris instinctivement et simultanément d'une nausée.
Ma mère compris rapidement que nous avions bouffé la soupe pensant qu'elle m'était destinée alors que la casserolle contenait tous les restes de la semaine, et était destinée à mon chien de l'époque, Titus...
Elle s'étranglait de rire pendant qu'Alexandre lui lança, sur un ton mi gêné mi désabusé:
"Bah Madame, elle était pas mauvaise! J'ai rien osé dire à Julien! Les morceaux de viande, les nouilles, la soupe, les patates, tout ca, ca m'a pas paru spécialement bizarre, mais les croutes de fromage, je dois avouer que j'ai pas trop compris..."
Moi, je m'étais pas étonné que la soupe que ma mère était censé m'avoir préparée comporte des croûtes de fromage, mais Alexandre, lui, s'en était bien sur étonné, et ne les avait pas touchées bien évidemment...
Et voilà comment un soir de pêche, j'ai fais bouffer à mon meilleur pote la bouffe du chien
Un souvenir lui aussi encré dans nos mémoires à jamais